Les physiciens ont créé un noyau en forme de citrouille qui a battu le record d’émission de protons avec la demi-vie mesurée la plus courte pour un émetteur de protons.
Dans Physical Review Letters, une équipe internationale rapporte la demi-vie d’un noyau qui émet des protons, un type rare de désintégration radioactive où un atome émet un proton. L’équipe a estimé que la demi-vie d’une telle émission était d’environ 450 nanosecondes, la plus courte jamais mesurée de tout isotope émetteur de protons.
Chaque élément connu a des isotopes, des versions de lui-même qui ont le même nombre de protons et d’électrons (donc la chimie est la même) mais un nombre différent de neutrons, ce qui peut le rendre plus lourd ou plus léger et ainsi affecter ses propriétés physiques.
Le nombre variable de neutrons dans le noyau joue également un rôle dans sa radioactivité. Les protons sont chargés positivement et ils devraient simplement se repousser, rendant impossible la formation de quoi que ce soit d’autre que l’hydrogène basique. Mais grâce aux neutrons – et à la forte force nucléaire des quarks qui fabriquent les protons et les neutrons – les noyaux restent ensemble. Au moins pour un petit moment.
Dans la nouvelle découverte, les physiciens ont créé un isotope rare du lutétium. L’émission de protons ne se produit pas dans les isotopes naturels, les scientifiques doivent donc créer des noyaux vraiment étranges.
Le lutétium a 71 protons et son isotope le plus courant a 104 neutrons. Dans cette configuration, l’atome n’est pas radioactif. L’équipe a plutôt utilisé une technique pour créer un isotope du Lutétium-149, qui ne compte que 78 neutrons. Le nombre beaucoup plus petit de neutrons le rend instable. Il produit également une forme assez étrange. Les forces nucléaires ont poussé les protons et les neutrons dans une configuration très aplatie : en gros, c’est en forme de citrouille.
L’équipe a observé 14 événements de cet atome. Ils rapportent que le lutétium-149 est également l’émetteur de protons le plus aplati jamais mesuré et celui dont l’énergie de désintégration des protons à l’état fondamental est la plus élevée jamais enregistrée.
Les physiciens, qui travaillent au Laboratoire des accélérateurs de l’Université de Jyväskylä, en Finlande, ont créé cet isotope particulier en projetant des atomes de nickel-58 dans une fine cible de ruthénium-96. Les atomes de lutétium-149 ont ensuite été implantés avec un détecteur à bande de silicium où ils ont pu être étudiés. L’isotope du lutétium-149 se désintègre en ytterbium-148, qui est également radioactif mais se désintègre dans la désintégration bêta plus traditionnelle, en émettant un positon (la version anti-matière positive de l’électron).
Maintenant, l’équipe dispose de quelques pistes pour approfondir ses recherches. Les propriétés du lutétium-149 pourraient être étudiées plus avant à l’aide de rayons gamma, bien que ce ne soit pas facile. Ils pourraient également essayer de créer du lutétium-148, qui peut avoir une demi-vie plus longue. Les études actuelles et futures sont utiles pour tester des modèles d’émissions de protons dans des atomes vraiment exotiques et conduiront à de meilleurs modèles capables de prédire les propriétés des noyaux.